L’Association internationale de recherche en management Public (AIRMAP)
L’AIRMAP regroupe des institutions ainsi que des chercheurs français et étrangers spécialisés dans les domaines du management public et de l’action publique. Lieu d’échange entre les milieux universitaires et les acteurs de l’agir public, l’AIRMAP est aussi un lieu d’exploration d’idées, d’instruments novateurs pour améliorer l’action publique.
Le 13ème colloque de l’AIRMAP se déroulera à l’Université de Picardie Jules Verne les 12, 13 et 14 juin 2024 et aura pour thème « Gestion publique : fractures et cohésion - penser/panser les maux de nos sociétés ».
L’AIRMAP invite les communautés des sciences de gestion et des sciences sociales à présenter autour de cette question :
Le colloque est soucieux de mettre en valeur notamment :
La fracture est une métaphore médicale qui suggère une cassure rompant une unité à retrouver.
Dans le champ du management public, l’expression est à la fois le constat de l’échec des politiques conduites et l’appel à un renouvellement des modes d’action de la puissance publique via les multiples innovations qu’initient les gestionnaires et acteurs publics pour créer de la cohésion au sein du corps social.
Pour réduire la fracture, il faut donc :
• Penser : identifier, mettre des mots sur les maux,
• Panser : définir et appliquer le traitement adéquat pour retisser les liens sociaux.
On doit à Marcel Gauchet et à Emmanuel Todd d’avoir proposé le concept de fracture sociale. Marcel Gauchet souligne à ce propos « La fracture, c’est une séparation entre des gens qui vivent pour ainsi dire dans des mondes différents. … «Fracture» est donc un terme assez commode pour décrire un état de très forte hétérogénéité, qui a fait le succès, par exemple, de l’opposition entre la France d’en haut et la France d’en bas. Nous sommes devant une dynamique de fragmentation où les micros-conflits foisonnent, mais sans se fédérer dans des oppositions claires… On ne peut même plus parler «d’une» fracture sociale, il faut dire «des» fractures sociales, qui se sont accentuées et multipliées depuis le début des années 1990.» (Gauchet et Todd, 2016)
Dans nos sociétés fragmentées et fracturées, les liens distendus entre les individus amènent à nous interroger sur notre conception du vivre ensemble et de la gestion de la cité.
Alors que la gestion publique doit garantir l’intérêt général et incarner le collectif, elle semble impuissante à assumer ce rôle, face à l’éparpillement et à la confrontation des intérêts particuliers.
Le constat ne concerne pas que le champ du social, mais chacun des grands domaines d’intervention de la puissance publique.
Les questions soulevées sont multiples comme le souligne l’exemple de la fracture territoriale dont les émeutes récentes ont montré la profondeur : où se situent les fractures ? entre les villes et la France périphérique ? au sein des métropoles ? entre les quartiers ? dans les quartiers ? Comment l’État, promoteur de la notion d’égalité des territoires, peut-il résorber les inégalités territoriales ? Comment les responsables locaux peuvent-ils promouvoir leur territoire, favoriser le développement économique, créer de la cohésion sociale alors que leur pouvoir est contesté et que les moyens financiers dont ils disposent sont limités ? Comment assurer l’égal accès au service public ? Comment réguler dans un territoire l’habitat/le logement/le transport/l’urbanisme, etc. ? Comment accompagner la transition écologique ? Et pour chacun des domaines traditionnels de la gestion publique : gestion de la santé, pilotage des systèmes éducatifs, régulation et accès au numérique, gestion du social, de l’économie sociale et solidaire, etc. se posent, de même, de multiples interrogations sur l’origine des difficultés rencontrées et les solutions apportées ou à apporter afin de retrouver les voies de la cohésion.
Autant de questions auxquelles les contributions attendues tenteront de répondre.
Ces interrogations amènent à questionner les visions et valeurs du service public. Quels processus d’élaboration des politiques publiques et de pilotage des organisations mettre en œuvre pour réduire les fractures qui nous divisent et, en filigrane, pour permettre au management public de se réinventer ?
Il est loin, en la matière, d’y avoir consensus.
Faut-il, considérant que les préceptes du New Public Management (NPM) n’ont pas été suffisamment compris et assimilés, renforcer les politiques conduites sous cet étendard et réduire le périmètre de l’État ? Les initiatives privées, débarrassées d’un carcan bureaucratique étouffant, pourraient alors créer de la croissance, un vecteur possible de cohésion sociale.
Faut-il, au contraire, radicalement remettre en cause les politiques conduites sous cette même bannière en organisant un retour de l’État, réarmant la puissance publique pour panser les maux d’une société et prévenir son éventuelle désagrégation ?
Face aux crises économique, sociale, politique, internationale, migratoire, écologique, si la voie du retour de l’État est suggérée, doit-elle prendre la forme d’une rénovation de l’État providence caractéristique de la seconde moitié du XXe siècle ? Ne faut-il pas plutôt emprunter une autre voie, plus autoritaire, réaffirmant la prééminence de la puissance publique, imposant plus que négociant des solutions pour, dans un contexte d’urgence, affronter les menaces du monde à venir ?
Faut-il, autre hypothèse, repenser totalement le système et la gestion publique faisant fi de la dichotomie classique gestion publique/gestion privée, jugée obsolète face à des défis nouveaux comme l’immense chantier de la transition écologique, gérant des communs plutôt que des organisations publiques ?
Ces éléments non exhaustifs peuvent être abordés sous l’angle des disciplines classiques de la gestion (stratégie, ressources humaines, finance, systèmes d’information, marketing, etc.). Ils peuvent également être traités sur une base sectorielle ou des champs de compétences des territoires (santé, éducation, urbanisme/ habitat/logement, transport, développement économique, emploi, intégration sociale, culture, captation des ressources naturelles, sécurité et risque, innovation et accès au numérique, etc.).
L’analyse peut aussi porter sur les interactions, les confrontations et les collaborations entre des acteurs concernés (les groupes sociaux, les habitants, les citoyens, les entreprises, etc.) ; les acteurs décideurs (les élus, les administrations, les techniciens, etc.); les acteurs intéressés (les associations, les experts, les mandataires, etc.).
Ce sont ces questions auxquelles le 13 ème colloque AIRMAP tentera de répondre.
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TODD Emmanuel, 1995, « Aux origines du malaise politique français. Les classes sociales et leur représentation », Le Débat, 1995/1 (n°83), p. 82-103.
VANDENINDEN Élise, Fracture (sociale, numérique, etc.). In: Quaderni, n°63, Printemps 2007. Nouveaux mots du pouvoir : fragments d’un abécédaire. p. 46-48.
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